Brevet unitaire : le Parlement européen remet en place une procédure démocratique. Participons !
Le 10 juillet 2012, la Commission des affaires juridiques (JURI) du Parlement européen a débattu du brevet unitaire et de la suite à donner au dossier. Suite au report de l'examen du texte lors de l'examen en session plénière, il ressort de ces discussions une violente critique des méthodes, pour le moins contestables, des États membres visant à faire passer leurs modifications, ainsi que la décision de rediscuter d'un hypothétique règlement sur le brevet unitaire en septembre. Avec ces derniers événements, le débat sur les dispositions du texte est à nouveau ouvert, et l'April appelle donc les eurodéputés à l'améliorer et les citoyens à se mobiliser pour assurer le respect des droits fondamentaux, la mise en place un véritable brevet de l'Union européenne et l'interdiction définitive les brevets logiciels1.
La question du brevet unitaire a en effet fait l’objet de multiples rebondissements depuis fin juin 2012. Alors que le Parlement européen et le Conseil des ministres semblaient s'être mis d'accord il y a plusieurs mois sur le contenu du futur paquet législatif, le Conseil européen (qui regroupe les chefs d’État et de gouvernement des États membres) avait exigé des modifications substantielles du règlement sur le brevet unitaire, qui l'auraient totalement dénaturé. Ce « précédent politique extrêmement grave », pour reprendre les mots mêmes du représentant de la Commission ce matin, a été dénoncé en commission parlementaire aux affaires juridiques (JURI), car le Conseil européen n'a légalement aucun rôle dans le processus législatif de l'Union européenne2.
De plus, comme l'ont souligné l'ensemble des acteurs présents ce matin en Commission JURI, la suppression demandée par le Conseil européen entraînerait très probablement l'illégalité de l'ensemble du règlement3. Si les États refusent finalement l'accord trouvé en décembre entre les négociateur du Parlement, le Conseil de l'UE et la Commission4, il s'agit donc d'en faire une réécriture globale et non de supprimer des dispositions essentielles du projet. C'est d'ailleurs ce qu'a souligné le rapporteur en commission JURI, Bernard Rapkay, en rappelant qu'il y avait un texte de compromis, mais que le Conseil européen « avait mis des bâtons dans les roues » du Parlement européen : en conséquence, s'il fallait recommencer les négociations, tout était à nouveau ouvert et le texte pouvait être modifié.
L'April est à disposition des eurodéputés et des institutions européennes et leur propose son expertise afin de s'assurer que le projet finalement adopté respecte bien le droit européen, y compris les droits fondamentaux, et favorise concrètement l'innovation et la concurrence5. Comme l'ont souligné les eurodéputés du groupe des Verts, Eva Lichtenberger et Christian Engström, la proposition actuelle est vidée de son contenu et ne permet pas la création d'un véritable brevet de l'Union européenne. La remise sur la table des débats pourrait permettre de pallier les carences du projet, qui avaient été pointées à de nombreuses reprises par l'April6.
Mais pour que ces positions soient entendues, il reste essentiel que les eurodéputés soient informés, et sensibilisés. Nous avons mis pour cela des outils à votre dispositions : un résumé des dangers posés par le brevet unitaire, ou encore des questions que les eurodéputés peuvent poser et des amendements au projet actuel de règlement. La liste des députés de la Commission JURI est disponible sur le site mémoire politique de la Quadrature du Net. N'hésitez pas à les utiliser et à les diffuser, et à nous contacter pour toute question !
Cette actualité a initialement été publiée sur le site web de l'April.
- 1. Pour plus d'information sur ces dangers, voir notamment la tribune de Michel Rocard et Daniel Cohn-Bendit, publiée par Mediapart : L'Union européenne sous la menace des brevets.
- 2. Pour mémoire, le processus législatif dans l'Union européenne pour le règlement sur le brevet unitaire est assuré par une co-décision entre le Conseil des ministres (aussi appelé Conseil de l'Union européenne) et le Parlement européen. Le Conseil européen, qui regroupe les chefs d’État et de gouvernement, n'intervient normalement pas dans l'élaboration des législations mais est chargé de définir des « impulsions générales » selon l'article 15 du Traité sur l'Union européenne (TUE).
- 3. Pour plus d'information sur ce point, voir notamment l'article Pourquoi le Conseil européen a tué toute viabilité d'un brevet de l'UE.
- 4. Voir notre article Brevet unitaire : un accord pas nécessairement final.
- 5. Voir notre analyse juridique détaillée : Base juridique du brevet unitaire : ne pas jouer avec le feu !.
- 6. Pour plus d'information, n'hésitez pas à consulter notre site http://www.brevet-unitaire.eu.